L’année 2017 vient de s’achever et la nouvelle commence déjà avec son lot de mesures et projets ; l’occasion pour nous de faire un point sur les premiers mois à la tête de l’État de l’ex-banquier Macron et de son gouvernement.
L’année 2017 a de quoi laisser un goût amer, car les « réformes » du nouveau gouvernement ne se sont pas fait attendre. Tout d’abord, cette année a été marquée, comme la précédente, par la défaite d’un mouvement social, qui a peiné à se construire face aux ordonnances. Maigre compensation néanmoins, les garanties qu’ont réussi à arracher certaines branches d’activité, comme le transport routier, qui, après plusieurs jours de grève et de blocages, ont obtenu une sanctuarisation de leurs primes, frais de déplacement, prenant ainsi à rebours la logique des ordonnances.
La ligne antisociale adoptée, sans surprise, par le gouvernement a frappé tout le monde, toutes classes d’âge confondues : d’abord avec l’annonce d’une diminution de 5 euros des APL – qui frappe principalement les populations les plus précaires et les plus jeunes – suivie d’une amputation de 50 euros des APL des locataires du parc social, et d’une augmentation de la CSG, qui, cette fois, s’impose durement à plus de sept millions de retraités. S’ajoute à ces multiples mesures, la quasi-suppression de l’ISF, qui permet aux plus riches de conserver les profits et les rentes qu’ils ont durement acquis à la sueur du travail des autres.
Simultanément, avec la fin de l’année, le maigre vernis progressiste dont avait tenté de se parer le gouvernement macroniste au cours de la campagne présidentielle s’est vite écaillé, notamment avec la circulaire, révélée le 12 décembre, qui permet le recensement des migrants dans les centres d’hébergement d’urgence par des équipes mobiles d’agents de préfecture de l’Office des migrations internationales. De même, les révélations portées au grand jour quant aux pratiques de la gendarmerie nationale arrêtant et abandonnant en haute montagne les migrants passés par le col de l’Échelle au péril de leur vie, ont également participé à révéler la véritable ligne xénophobe et raciste de la nouvelle classe politique au pouvoir. Si, face à ces exactions, une solidarité montagnarde s’est rapidement organisée dans la région, celle-ci est déjà la cible d’une répression d’État qui s’acharne à poursuivre les bénévoles qui soignent, aident et recueillent des migrants bien souvent épuisés et mis à mal par leur périple.
Un nouveau palier a également été franchi début janvier dans la politique de chasse aux migrants déjà déployée avec l’annonce du projet de loi anti-immigration, ce dernier visant, selon le gouvernement, à « mieux accueillir les réfugier » et à « mieux renvoyer ». Doux euphémismes pour une politique qui s’inscrit dans une logique du tout-répressif qui, à cet égard, fait passer les anciens gouvernements Valls et Sarkozy pour des sociaux-démocrates progressistes. En effet, ce projet, tout en réduisant les délais de dépôt des dossiers de demande d’asile, entend explicitement augmenter le nombre d’expulsions, faciliter la chasse aux sans-papiers pour les forces de l’ordre, augmenter la durée maximale de détention et favoriser une immigration « choisie », concept cynique s’il en est.
Le 1er janvier 2018 a, par ailleurs, signé le coup d’envoi des projets de rupture conventionnelle collective que permet désormais l’entrée en vigueur des ordonnances Macron. Celles-ci, éhontément vendues par le gouvernement, à qui voulait l’entendre, comme créatrices d’emplois, est en réalité un dispositif de facilitation des licenciements massifs. Le patronat, lui, ne s’y est pas trompé et n’a pas attendu pour se saisir de ces facilités. Ainsi, dès le début de l’année, les entreprises Pimkie, Renault PSA révèlent vouloir y faire appel ; dans la presse Les Inrocks et Le Figaro s’y intéressent également. Ces ruptures conventionnelles collectives permettent à l’employeur de contourner les obligations induites par un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) ou par un plan de départs volontaires (PDV). Celui-ci n’a plus à justifier de difficultés économiques ou à subir un contrôle judiciaire pour justifier l’utilisation de cette mesure, ni à répondre à l’obligation de formuler des propositions de reclassement, des actions de formations ou de soutien aux salariés licenciés. La direction de Renault PSA y voit, en outre, l’occasion de se séparer de salariés en CDI, pour réembaucher par la suite dans le cadre de CDD ou de contrats d’intérim. Bref, avec le gouvernement macroniste, on n’arrête pas le progrès.
Et l’année est loin d’être finie. Prochaines réformes dans les tuyaux du gouvernement et qui a de quoi nous faire frémir, celle de l’Assurance chômage, avec un renforcement du contrôle des chômeurs – qui vient ainsi renforcer la désormais courante logique de stigmatisation des privés d’emploi. Chantier moins visible mais pour autant plus que pernicieux : la mise en place en janvier (devant se poursuivre en octobre) de la fin du salaire socialisé, et ce, à travers la réduction des cotisations chômage et maladie ; réduction censée augmenter le fameux « pouvoir d’achat » des Français, mais qui à n’en pas douter, se traduira, in fine, par une destruction des derniers mécanismes institutionnalisés de la solidarité sociale. Enfin, dernière réforme d’ampleur annoncée, celle des retraites, que le gouvernement entend entériner d’ici fin 2019, avec comme objectif la fin des régimes spéciaux.
Les premiers mois à la tête de l’État du président Macron ont ainsi, sans surprise, confirmé sa détermination et celle de son gouvernement à multiplier les réformes de précarisation et de casse sociale, tentant ainsi de nous réduire au silence et à la soumission pour finalement nous jeter dans la gueule d’un patronat toujours plus avide de profit. En somme, il y a fort à parier que 2018 sera une année de luttes ou bien signera une période de recul social historique. Pour autant, il nous reste encore des perspectives et des marges de manœuvre dont nous devons nous saisir, à commencer par celles qui se trouvent directement à notre portée : sur nos lieux de travail, de vie, dans nos organisations syndicales. Il y a dans ces endroits des colères et des déterminations qui sont fortes et c’est de là que cela doit partir. Gageons que les actions corporatives qui feront leur preuves, juxtaposées à d’autres, pourront initier un mouvement d’ensemble qui en inspirera encore d’autres.
Groupe anarchiste Salvador-Seguí
Paris, le 14 février 2018